Un oiseau dans sa cage
M'a conté son triste esclavage
Un oiseau dans sa cage
M'a chanté cette chanson
Depuis bien longtemps
Je me lamente
Et pourtant
Cette méchante
Me garde en prison
Plaignez l'oiseau fidèle
Toujours dans sa cage
Plaignez l'oiseau fidèle
Tout seul dans sa prison
(L’oiseau Fidèle / Georges Guétary)
Connaissez-vous cette chanson ? Elle date de mon enfance. Chaque été, je
passais mes vacances à la campagne, chez mon grand-père, et surtout avec ma
grand-mère, qui demandait à ma mère
si je pouvais lui tenir compagnie. Je
pourrais écrire un long carnet sur mes vacances chez mes grands parents. Passer une bonne partie de mon été chez eux
était pour moi une grande joie. J’aimais
bien être toute seule avec ma grand-mère.
En fait, j’aimais bien être toute seule, point.
Le salon était une pièce spéciale. La porte était toujours barrée avec une
targette assez haute pour qu’aucun enfant n’y ait accès. Elle s’ouvrait que pour les fêtes ou lors de
visite importante comme par exemple, celle de « monsieur le curé ». Mon grand-père me permettait d’y entrer en
toute occasion, je n’avais qu’à lui demander et autant de fois que je le
souhaitais. Mes grands parents devaient
certes s’amuser de m’entendre, parce que j’y allais pour une raison aussi
spéciale que la pièce. Je voulais chanter.
Je m’y appliquais comme si je me donnais
en spectacle. Il y avait un gramophone
et des disques 33 tours. Il y avais celui
de Doris Day dans mes choix mais mon préféré était celui de Georges Guétary, et ma chanson favorite
était celle-là : L’Oiseau Fidèle. Je
m’en rappelle encore. Et de mes étés, et
de la scène dans le salon et de la chanson.
Et ce matin, après avoir fait ma nouvelle
activité, prendre ma marche dans les jardins du Grand Hôtel, l’Oiseau fidèle m’est revenu en tête. Assignée à résidence depuis 5 semaines, ne
suis-je pas un oiseau en cage à Niamey ? Contrairement à Georges, je ne chante pas mon
triste esclavage ni ne me lamente et ne me plaignez surtout pas. J Je suis bien dans ma prison.
La vie et un long fleuve Niger
tranquille depuis 5 semaines.
J’ai lu 6 romans.
J’ai fait mes 6 tours de piscine tous les matins. Je suis allé manger au très chic et beau
restaurant italien Le Pilier. En fait,
j’ai tout fait, chaque jour, pour ne pas que l’ennui me tienne compagnie. J’ai réussi.
Il me reste 6 jours encore, et je ne dis pas
« Enfin ! ». Au
contraire, j’attends le prochain séjour.
En janvier, si la tendance se maintient.
C’est mon dernier chapitre.
J’ai relu mes
carnets, et je vois bien que je n’ai rien de bien trépidant à raconter. Je farfouille dans les petits riens pour
tenter de me faire intéressante et je ne suis pas certaine d’avoir réussi. Je ne vais pas encore décrire mes sorties au
supermarché Hadad avec « mon ami Moussa ». Même si, grande nouvelle, Hadad a augmenté sa superficie. Il y a de nouveaux rayons. Ce qui me permet d’y passer un peu plus de
temps. Et ça ne me coûte pas plus cher
de taxi, puisque Moussa et moi…on est
ensemble. Il m’a dit « Avec
Suzanne pas de discussions ». Il
dit que je suis « trop gentille » il dit même « que tout le
monde à l’hôtel dit que madame Suzanne elle est trop gentille ».
Je l’ai dans ma
poche mon vieux grognon. C’est mon
chauffeur de taxi favori. Il m’a offert
d’aller voir les Girafes au Park je ne sais lequel. C’est à 60km d’ici. « Pour Suzanne, Girafes à petit
prix » qu’il ma dit. L’oiseau fidèle
aimerait tellement y aller « en brousse ». Bien malheureusement, mon cher Moussa, je ne
peux pas sortir de ma cage. Et je lui
expliqué à propos des assurances, de notre voisin Boko, de l’insécurité, etc.
etc. On verra en janvier ?
J’imite tellement
bien le « froooonçais » que le Barman m’a dit l’autre matin, alors
qu’il venait me porter mon Youki soda
water + citron, à mon « spot » habituel de la piscine, à l’ombre du
palmier : « Vous êtes canadienne ? Mais madame Suzanne, vous ne parlez pas
Canadien ! » Semble-t-il
que mon français est « très bon ».
Il croyait que j’étais une froooonçaise.
Je lui ai dis que c’était par déformation professionnelle, vu le nombre
d’année que je bourlingue en Afrique. Et
que si je parlais canadien, ça sonnerait comme du chinois à ses oreilles.
La table des V.I.P.
C’est ainsi que mon
tout charmant Ibrahim appelle la table du « Grand Boss » (le surnom
qu’il donne à A.). Tous les soirs il met
une nappe rouge. Les autres en ont une
bleue. Et il met une carte
« Réservé » sur la table.
Au séjour précédent,
c’est lui qui s’occupait de la table V.I.P. du Grand Boss et durant les 3
semaines que nous avons mangé ici. À
notre arrivée, en octobre dernier, déception pour nous, il était en congé
pour 3 semaines encore. Ce qui a fait le
bonheur des autres Serveurs va sans dire.
Hussein d’abord et Abdoulaye l’a « détrôné » ensuite. Faut avouer que le pourboire que donne A. est
très alléchant. On se disputait la table
du Grand Boss, Yaye le Barman compris.
Tellement qu’ils nous avaient pris en otage. Malgré le retour d’Ibrahim, ils continuaient à
réserver « leur » table. C’était
gênant pour nous de dire: On déménage
chez Ibrahim ! Évidemment, ça n’a
pas été bien long, « Il y a eu dispute
et discussion ! » que m’a dit Ibrahim.
Et qui a
gagné ? Vous voyez les V.I.P. assis
à la table 30 depuis déjà 8 jours. Et
Ibrahim il est content. Pi nous
avec. On l’aime Ibrahim. C’est lui qui a gagné le concours du
« Meilleur Serveur » et aussi « Meilleur vendeur » du Grand
Hôtel. Il est « très classe »
mon Ibrahim. Il vient me saluer sous mon palmier tous les matins.
Perso, je le gâte à
souhait. Je lui ai apporté plein de
petites bricoles pour sa moto par exemple. Je lui ai aussi donné une montre rouge, comme
celle de mon cher Gaétan du Méridien.
Mieux encore, je lui ai aussi donné une jaune en plus. Ce sont des « chinoiseries » les
montres, mais elles sont remarquables.
Elles ne passent pas inaperçues.
Je pense que je
vais terminer ici mon carnet de voyage « Niamey octobre-novembre 2015 ».
À moins qu’un
événement super spécial arrive d’ici
le 18 novembre.
15 novembre 2015
Pour un événement spécial, ça en est TOUT UN.
On a passé une
partie de la journée « scotché » devant la télé. L’horreur ! La Barbarie ! était au programme avec des CRÉTINS comme acteurs. Je vais taire mon opinion. Mais ça bourdonne dans ma tête. Mes mots ne sont pas beaux à écrire. Pour éviter de dire des bêtises je vais faire
un « chapitre silence » en hommage à tous ces pauvres innocents mort
certes pas parce que « Dieu est grand » mais POUR RIEN !
Nous quittons mardi
à minuit, 2 dodos pour ma chérie Marilou.
J’anticipe d’avoir
des problèmes à Paris, au passage de la sécurité.